Error 404 : ribbon not found [Mei;Kaede]

« Parfois je me dis que je suis vraiment stupide. »

Mei Katami & Kaede Haku

Un autre jour au lycée. Tout aussi ennuyant que les précédents, et certainement les suivants. Inconsciemment, j'avais encore passé ma matinée à dormir sur ma table de cours... tout ça à cause de ce satané boss ! D'ailleurs je n'avais toujours pas réussi à le vaincre ; il fallait que je m'en charge le soir-même, une fois rentrée : hors de question que je le laisse en vie une fois de plus ! C'était certain, il allait me le payer, et donc faire ce travail supplémentaire que j'avais obtenu... pas comme s'il en était capable, malheureusement. Pourquoi les devoirs ne pouvaient-ils pas se faire tout seuls ? Et pourquoi n'y avait-il pas de cours sur les jeux vidéo ? Au moins là, j'aurais été certaine d'avoir une bonne note !

Au moins une note qui n'aurait pas été rouge sur le bulletin, sans compter le sport qui était la seule matière où je réussissais. Un cours de dégustation aussi, ça pourrait être ma spécialité ! D'ailleurs en parlant de ça, mon estomac commençait à pas mal creuser : il le réclamait, ce fabuleux repas préparé... par mes soins ! Pour une fois que j'avais pris le temps de le préparer moi-même. Et j'y avais passé beaucoup de temps ; un temps qui aurait pu être précieux pour éliminer cette énergumène de boss, mais beaucoup d'ingrédients y étaient passés également. Ça, en le découvrant, mon oncle ne serait probablement pas très ravi, m'enfin. Il n'allait pas se plaindre, j'avais fait de mon mieux ! C'était lui-même qui m'avait fait la remarque... à moins que je n'en avais rêvé ou que ça venait d'un rêve ?

Du coup, pour la pause du midi, je m'étais installée dehors. Dans l'herbe, tranquillement, sans personne pour venir perturber mon calme si... ennuyant. C'était dans des moments comme ça que je voulais avoir quelqu'un avec qui discuter, ne serait-ce qu'un tout petit peu, seulement pour un moment ! Une fraction de seconde même ! Boudant un peu parce que je venais de me faire ridiculiser par mon propre cerveau -ce qui arrivait souvent lorsqu'il décidait de se réveiller-, je me mis à jouer avec l'un des rubans utilisés pour maintenir les deux petites nattes perdues à l'avant de ma chevelure. Il s'agissait d'un cadeau qui me tenait énormément à cœur, que je chérissais plus que tout : le tout premier objet offert par mon oncle. C'était une preuve de notre relation père adoptif/fille.

Lorsqu'il fut temps de retourner en cours, je me mis à grommeler mais me rendit en classe, n'ayant pas tellement envie de repartir avec encore plus de travail qu'à la base. Comme je ne dormais pas cette fois, le temps me parut long, très long car je n'avais plus qu'une hâte : rentrer chez moi et m'étaler sur mon lit comme une vieille chaussette pour pouvoir jouer en mangeant des chips. Et oui,  tant d'élégance en ma personne, moi qui étais censée être une femme tout ce qu'il y avait de plus féminine. Au pire, cela me regardait : ce n'était pas comme si quelqu'un avait installé des caméras de surveillance dans ma chambre et pouvait dans ce cas savoir comment je me comportais chez moi ! Tant mieux d'ailleurs, sinon ce serait très effrayant.

N'écoutant qu'à moitié les paroles du professeur, j'entendais quelques mots, mais la majorité correspondait à 'bla bla bla', même quand j'essayais d'être réellement attentive. À croire que je n'étais pas en condition pour le faire. Je me mis donc à jouer avec mes cheveux en me disant que ça ferait peut-être passer le temps plus vite mais au lieu de ça, ce fut autre chose qui changea, et ce très rapidement. Un élan de panique m'envahit soudainement : là, à cet endroit, sur ces mèches de cheveux rebelles... le ruban était censé être ici. Pourquoi n'y était-il pas ? Quand l'avais-je perdu ? Bon sang, pourquoi ça m'arrivait aussi souvent quand je tenais à quelque chose !

Que faire ? Le professeur ne me laisserait certainement pas sortir en avance, encore moins pour un ruban... et je n'avais pas la moindre idée d'où chercher de toute manière. Et si j'attendais la fin de la journée, je risquais de mourir intérieurement par inquiétude ! Mais bon, une fois de plus, je n'avais pas le choix : je me devais d'attendre que le dernier cours soit terminé. En attendant, il fallait que je réfléchisse aux différents lieux où j'aurais pu le perdre. Si ça n'avait été qu'un objet quelconque, j'aurais certainement plaisanté en disant que cela ressemblait à une chasse au trésor, mais ce n'était pas le cas : d'ailleurs, histoire de m'enfoncer encore plus, mon cerveau se moqua de moi en me balançant un 'haha bien fait pour toi' en plein visage.

Quand la dernière leçon fut terminée, je me précipitai hors de la salle pour commencer à fouiller le moindre recoin du lycée où j'aurais pu passer, mais rien : il n'était donc pas à l'intérieur. Il restait alors la partie la plus grosse : l'extérieur, là où j'avais passé l'heure du midi à m'empiffrer comme ce n'était pas permis. Peut-être était-ce une punition pour ma gourmandise après tout ? Je me dépêchai donc de sortir, commençant à inspecter l'herbe avec attention. S'il fallait y passer la nuit alors je le ferais, sans hésitation ! J'y tenais bien trop pour le laisser disparaître ainsi. Sans m'en rendre compte au départ, dans le passé, j'y avais accordé une certaine valeur sentimentale. Je me souviens quand mon oncle me l'avait fait remarquer... et que je m'étais vexée.

« … je dois le trouver à tout prix. »

Me rappeler ça m'avait fait monter les larmes aux yeux, sans même que je ne puisse essayer de les contenir. Certes, cela avait été une raison stupide pour le bouder à cette époque, mais j'avais toujours été comme ça, à me cacher derrière un masque pour que mes sentiments ne soient pas à découvert. Ah, pathétique petit lapin que j'étais. Ce n'était pas comme si quelqu'un allait soudainement débarquer pour me tendre la main et me proposer de m'aider, j'étais l'ébène dans le blanc après tout. Une enfant si pathétique que j'avais succombé à mon désespoir et que les larmes coulaient à présent sur mes poings serrés, reflétant toute ma détresse à cet instant précis.

J'étais consciente de la réalité, et pourtant j'avais toujours cette petite voix qui espérait qu'on l'entende et qu'on me vienne en aide : celle de mon cœur. Mais même si je savais tout ça, ce n'était pas une raison d'abandonner. Tentant de lutter du mieux que je le pouvais contre mes larmes, je les essuyai à l'aide de mes mains pleines de terre et je me remis à chercher au ras du sol, avant de penser à une évidence qui aurait dû me traverser l'esprit plus tôt : et si jamais il s'était envolé ? Il serait alors peu probable que je puisse le retrouver ! Que faire... je me sentais si mal, si bête de l'avoir perdu aussi naïvement que j'étais prête à faire quasiment n'importe quoi pour rattraper mon erreur.

« Parfois je me dis que je suis vraiment stupide. »

Mei Katami & Kaede Haku

« Les lapins courent plus vite que les renards. Pourquoi ? Simplement parce qu'ils courent pour survivre. »

Hein ? On me parle là ? Non ce n'était pas possible, cela ne devait être que le fruit de mon imagination... peu de personnes avaient daigné s'intéresser à ma personne, alors pourquoi maintenant ? Pourquoi lorsque j'étais désespérée ? Du coup je restais là sans bouger, comme paralysée. Je ne voulais surtout pas qu'on me voit aussi faible, à pleurnicher dans un coin... non, je n'aimais pas ça. Mais je ne pouvais pas m'en empêcher, ce ruban était bien trop précieux pour que je me permette de le perdre. Restant à quatre pattes comme une andouille, je sursautai en voyant mon interlocutrice s'accroupir face à moi.

« N'abandonne jamais ce qui est important à tes yeux. Comme le lapin. »

Inconsciemment, je levai la tête vers elle, la regardant avec tout le désespoir du monde. Était-ce l'aide que j'avais secrètement souhaité ? Bon d'accord elle disait des phrases un peu bizarres que je ne comprenais pas spécialement, mais ça devait venir de la mauvaise connexion entre mon cerveau et moi, probablement. Et puis "le lapin"... c'était comme ça que je me qualifiais souvent. Le lapin d'ébène. Mais il y avait peu de chance qu'elle parle de moi, cela ne devait être que le hasard ? Ahh, j'étais capable d'attirer la pitié visiblement. Pourquoi restait-elle ici ? Que me voulait-elle en réalité ?

« Que cherche-tu ? »

Je vois... elle ne voulait que m'aider. Ou au moins me demander ce qui n'allait pas. Après tout, je pleurais à chaudes larmes. Après avoir essuyé mes yeux, je me rendis compte de l'état dans lequel j'étais : sale, pleine de terre. Une vision vraiment pitoyable. Levant mon regard vers la jeune fille à nouveau, je me rendis compte que je la connaissais. Enfin, connaître, façon de parler : c'était une élève de ma classe. Je ne me rappelais plus trop de son nom, mais elle était dans le même cas que moi; elle n'attirait pas l'attention. Elle paraissait presque invisible auprès des autres, mais très certainement pour une raison différente de la mienne. Au moins, quand les gens lui parlaient, ils se souvenaient d'elle.

Moi ? C'était à peine si on me captait. Mais je ne les blâmais pas, parce que je savais que c'était en partie à cause de mes yeux rouges. Et puis, je ne faisais plus vraiment d'efforts donc j'avais encore moins de raisons de leur en vouloir. Pourtant, ça leur semblait si naturel de laisser des personnes à part : ça, ça m'énervait. Comme cette fille, qui ne devrait probablement pas être seule et elle l'était. Était-ce parce qu'elle ne souhaitait pas se mêler avec les autres ? Non, ce n'était pas possible... sinon elle ne serait jamais venue me voir. Peut-être ceux de notre classe lui paraissaient trop superficiels ? Ou alors je faisais vraiment pitié, c'était possible aussi.

Quand je me rendis compte à quel point je la fixais, et dans les yeux en plus, je détournai le regard en rougissant bêtement. Mais qu'est-ce que je faisais bon sang ? C'était dangereux avec ma capacité ! Heureusement que mes yeux ne s'étaient pas teintés de cette couleur pourpre, autrement j'aurais probablement paniqué et je me serais enfuie... et j'aurais séché les cours, même si c'était rare de ma part. Autre chose dont je m'aperçus : je ne lui avais pas répondu. Elle m'avait parlé, à MOI, et m'avait même posé une question. Et moi, comme une idiote, qu'est-ce que j'avais fait ? Je l'avais regardé comme un chiot venant de se faire gronder et je m'étais tue.

« M-Mon ruban... il est blanc... »

Je m'assis à genoux face à elle, observant ma camarade de classe d'un air intrigué. Certes ses propos étaient un peu étranges, sa manière d'agir aussi, mais... elle avait l'air si gentille dans le fond. Et je n'allais pas me le cacher, elle était très jolie : une peau de porcelaine et des cheveux d'une couleur assez originale, qui avaient l'air très doux. Les personnes comme ça je les sentais généralement à des kilomètres, alors pourquoi ne l'avais-je pas remarquée plus tôt ? Nous suivions les mêmes cours pourtant ! M'étais-je isolée à ce point sans même m'en rendre compte ? Ça devenait grave là... je commençais carrément à m'habituer à ma solitude, ou je me forçais à croire que c'était le cas. Au choix, je considérais la deuxième option plus probable.

Soudain, un détail me marqua : j'avais arrêté de pleurer. Quand ? Alors cette fille... elle était capable de me faire me sentir à l'aise, sans que j'ai besoin de cacher ce que j'étais vraiment ? Mais dans le fond, si elle devient mon amie... ne va-t-elle pas finir par faire comme tous les autres, à s'éprendre de curiosité et à déclencher mon pouvoir sous le coup de la panique ? Je secouai négativement la tête : non, cela ne semblait pas être son genre et puis, mes yeux normaux, elle les avait vus. Ceux que j'aimais pour leur couleur rose bonbon : pas que je confirme les stéréotypes sur les filles, mais moi, j'adorais le rose. Toutes les couleurs pastels aussi !

Je ne devais cependant pas oublier la raison pour laquelle j'étais ici : mon ruban. Et pour chercher, je n'avais plus beaucoup de temps, alors je ne devais pas rester là à observer cette jeune fille, bien que fascinée par sa personne ! Pourvu que je le retrouve avant la prochaine sonnerie, annonçant la fin de la pause... sinon, je ne savais pas à quel point j'allais déprimer. Et puis, secrètement, j'espérais qu'elle m'aide à le trouver : au moins cela me permettrait de faire sa connaissance et de pouvoir peut-être me faire une amie dans ma classe, non ? Wow, tu penses à ça alors que tu étais en train de paniquer totalement quelques instants plus tôt ? Tu évolues, petit lapin d'ébène aka. Kaede ! Oh, tais-toi toi, stupide conscience.

« Il est très important pour moi, c'est un cadeau de mon oncle... il m'a dit qu'il s'agissait du ruban préféré de ma mère autrefois. C'est pour cela que je dois le retrouver. »

Un sourire s'était emparé de mes lèvres, mais il reflétait plus de tristesse que de joie. Il avait l'air forcé à cause de mon visage abîmé par le passage de mes larmes, mais ce n'était pas le cas : il était parfaitement naturel. Sans plus attendre, je repartis à mes recherches, me fichant complètement de me transformer en tas de terre tant que je le retrouvais. Je le chérissais plus que tout... ce ruban, autrefois ornant les cheveux de ma défunte mère, celle que je n'avais pas connu alors qu'elle était encore en vie. C'était un passage de ma vie que je regrettais, mais je n'y pouvais rien, c'était comme ça.